Comme plusieurs organisations de la société civile l’ont déjà exprimé au cours des derniers mois, QuébecOiseaux s’inquiète des impacts potentiels du projet de loi 97, qui vise à réformer en profondeur le régime forestier québécois. Si le recours au concept de triade — répartissant le territoire entre conservation, foresterie extensive et foresterie intensive — peut paraître prometteur, plusieurs zones d’ombre demeurent, ce qui soulève des inquiétudes pour la conservation de la biodiversité, incluant les oiseaux et leurs habitats.

À l’origine, le concept de triade visait la recherche d’un compromis entre exploitation forestière et conservation. En allouant des terres particulièrement productives situées près des usines à une foresterie intensive, le gain en productivité permettait de réduire la pression sur l’ensemble du territoire forestier et d’augmenter la proportion de territoire vouée à la conservation. Or, le projet de loi ne reflète pas clairement cette recherche de compromis et les critères et principes qui guideraient le choix des aires de conservation ne sont pas explicites.

La forêt publique québécoise représente un patrimoine collectif qui doit être géré de manière durable, dans l’intérêt de l’ensemble de la population. Elle abrite une riche biodiversité et constitue une véritable pouponnière pour près d’une centaine d’espèces d’oiseaux. Toute réforme du régime forestier doit donc permettre de maintenir l’intégrité écologique de ces écosystèmes essentiels. Or, l’absence de détails quant aux superficies vouées à la conservation et aux critères de sélection de ces aires versus les zones d’exploitation intensive suscite de sérieuses interrogations.

QuébecOiseaux recommande que toute réforme du régime forestier :

• assure un véritable équilibre entre exploitation et conservation, en définissant des cibles claires et contraignantes pour la protection de la biodiversité, orienté vers la résilience climatique à long terme des forêts (face aux feux, sécheresses et épidémies);
• prenne en compte les exigences écologiques des oiseaux nicheurs, particulièrement ceux qui dépendent d’habitats rares et sensibles comme les vieilles forêts;
• repose sur une gouvernance transparente et inclusive, où la société civile et les experts en biodiversité sont pleinement consultés;
• soit conçue de façon à ce que les gains de productivité de la foresterie intensive se traduisent par une augmentation mesurable des aires de conservation.

QuébecOiseaux rappelle que la forêt québécoise ne constitue pas seulement une ressource économique : c’est un écosystème qui joue un rôle crucial pour les oiseaux et pour l’équilibre écologique de tout le continent nord-américain. Le projet de loi 97 doit refléter cette responsabilité collective.

Photo : Paruline à poitrine baie © Pierre Bonenfant